Dénonce Maître Romain SINTES
Jeune avocat formé pendant 10 ans au sein du cabinet de Me Christophe Lèguevaques le plus toulousain des avocats parisiens, Me Romain Sintès vient de prêter serment devant la Cour d’appel de Toulouse. Il a travaillé notamment sur les dossiers des surirradiés de Toulouse Rangueil et assisté en expertises médicales plusieurs dizaines de victimes. Dans le dossier Servier revenu dernièrement dans l’actualité, il n’hésite pas à nous livrer son retour d’expérience.
Vous n’avez pas peur de vous battre contre Servier ?
10 ans passés auprès de Me Lèguevaques m’ont appris à apprivoiser ma peur. Ce n’est pas tant la force affichée de l’adversaire ou de son avocat que je regarde, mais la cause à défendre, c’est plus excitant ! Et puis, quand vous mesurez l’intérêt d’une victime qui vous décrit pudiquement sa vie d’avant et sa vie d’après, la peur vous quitte et vous accomplissez pleinement votre mission.
Que dénoncez-vous ?
Après avoir pris le corps médical en otage ou corrompu certains décideurs, le groupe Servier profite du fait que trop souvent les victimes se présentent sans avocat et ne se rendent pas compte que leur préjudice n’est pas entièrement réparé.
Savez-vous qu’en matière d’indemnisation des préjudices corporels, il existe plus de 20 chefs de préjudices et pour chacun, il y a une règle de calcul différente ? Un exemple, suivant la date retenue pour la consolidation, les montants peuvent varier de plusieurs milliers d’euros. De même, la prise en compte d’un mauvais coefficient de capitalisation peut faire varier considérablement l’indemnisation.
Servier détourne le dispositif d’indemnisation amiable. Ce dispositif est en principe mis en place au bénéfice des victimes pour accélérer l’indemnisation et quasiment sans frais. Mais Servier après l’expertise médicale interprète lui-même le rapport d’expertise, et formule, lui-même, tout seul comme un grand, une proposition d’indemnisation non détaillée, à prendre ou à laisser. Le procédé devient donc inefficace puisque la victime est soit lésée, soit contrainte si elle n’est pas découragée, de se défendre.
Dans un dossier d’une victime du Mediator (et de la procédure amiable avec Servier !) pour lequel j’ai travaillé chez Me Lèguevaques, les conclusions, validées par l’avocat, disaient que la position adoptée par Servier dans la procédure tant amiable que contentieuse revenait à « purger son contentieux en proposant des indemnisations au rabais aux personnes qui ont fait confiance au dispositif mis en place ». Je vous invite maintenant à lire l’article du Canard du 25 février 2016 intitulé « La dernière astuce de Servier pour indemniser au rabais les victimes »…
Comment ces victimes ne peuvent pas, légitimement, perdre confiance dans le processus amiable au bout duquel elle se retrouve en direct face au labo ?! C’est cette façon de fonctionner qui, je pense est inadaptée : c’est demander au loup de garder la bergerie.
Que proposez-vous ?
Plus généralement et sans corrélation avec le problème juste avant évoqué, avec Me Lèguevaques nous discutons d’une plateforme interactive pour les actions regroupant un grand nombre de plaignants dispersés et rencontrant un problème similaire. Cette façon de fonctionner doit dans une certaine mesure se démocratiser dans notre système. C’est un moyen efficace de contenir la position dominante de géants (de la téléphonie, du transport, de la finance, des pesticides,…) qui disposent de moyens contre lesquels la victime isolée peut difficilement lutter. Si nous avons tous bien évidemment besoin de médicaments par exemple, on ne peut accepter que le fabriquant gros ou petits perde de vue l’intérêt du patient et l’éthique de sa profession pour des considérations purement pécuniaires au détriment de l’intégrité physique et corporelle d’un être humain. Le droit est un outil à la disposition de tout citoyen, il doit être accessible à tous.